Que de promesses attendues sur Eviden, mais n’est-ce pas ainsi que la bourse tourne, sur conte, crédulité et virtualité ? Quels sont les paramètres connus actuellement ? Le périmètre d’activités Eviden recouvre Digital (solutions cloud publics et hybrides, transformation digitale, intelligence artificielle, Internet of Things et décarbonisation) et Big Data & Security (cybersécurité et hyper-calculateurs). Pour NewAtos, il s’agit des infrastructure clouds privés et hybrides, de Digital Workplace, des services professionnels, externalisation d’activités et des plateformes collaboratives.
Une ligne de partage très poreuse : Eviden recherche des data-centers pour ses clients et NewAtos des ressources cybersécurité. Un accord stratégique est bien établi entre les 2 futurs groupes mais pourra t-il résister aux demandes clients, aux pressions sur les marchés et aux marges impératives pour Eviden qui portera la dette du groupe ? L’expérience IBM et sa scission avec Kyndryl le montre : ce dernier avatar spécialisé en Infrastructure n’a pas prouvé son autonomie : 2 ans après, il dépend à 70% d’IBM avec des marges réduites, sans valeur ajoutée boursière. Mc Kinsey a piloté ce projet et en a fait un copier/coller pour Atos. Les mêmes causes pourraient produire les mêmes effets !
La taille critique : la spécificité d’Eviden reste les supercalculateurs, mais les ventes HPC sont cycliques et peu prédictives, le nouveau bâtiment de l’usine d’Angers ne sera disponible qu’en 2026 et l’activité est dépendante des fournisseurs de composants. De nombreux paramètres sont donc incertains. Eviden se rationalise en regroupant ses forces pour une visibilité plus grande vis-à-vis du marché. Le projet One Data veut fédérer l’entité BDS Data solution, la practice AMS et l’équipe Urban Data Platform. Mais le tout ne comprend que 200 salariés. Même avec l’hypothèse annoncée de 30% de croissance d’ici 2026, l’effectif sera-t-il suffisant face aux demandes clients ? Le projet One Cloud regroupe les activités d’Edifixio, de CES Atos et Cloudreach. Le tout constitue une force de 550 salariés, certes non négligeable, mais est-ce au niveau de l’ambition d’Eviden d’être leader sur ce segment ?
La pression financière : le postulat est posé qu’Eviden, de par son positionnement sur les marchés dits porteurs, portera la dette d’Atos. Cela conditionne la stratégie de l’entreprise, les obligations impératives de résultats, les investissements et R&D très contrôlés voire limités. Eviden se retrouve le nez sur les prises de commandes, le chiffre d’affaires et surtout le résultat d’exploitation. Paramètres classiques dans l’économie mais exacerbés ici dès le départ par la dette originelle d’Atos. La marge exigée pour les activités, suivant le business plan des futurs groupes est de 22%, et même de 28% pour BDS ! Elle est actuellement à 17%…
Cela hypothèque les chances de « retour à la normale » concocté par Mc Kinsey à horizon 2026.
Auparavant, les continuels plans de réduction de coûts, les période de freeze qui sont passées de mois en année existaient pour dégager du cash afin d’alimenter la croissance externe d’achats de sociétés… Maintenant les efforts, accrus, serviront à survivre avec toujours les mêmes managers aux commandes…
Les contrats : et les clients dans tout ça ? Comment acceptent-ils cette réorganisation d’Atos ? La direction proclame que 70% des contrats sont déjà affectés à la structure juridique adéquate, mais aussi, que ceux qui doivent changer de raison sociale sont très peu acceptés par les clients. Certains, comme Safran, refusent la partition des prestations Atos. Notre direction a un plan B en cas de refus : un frontal Atos inchangé et une mise en place de sous-traitance vers Eviden…On voit déjà apparaitre les questions métaphysiques de gouvernance, d’accès direct aux clients, et de marges bien sur !
On en revient à l’écueil de concurrence qu’il y aura immanquablement entre les 2 futurs groupes… Entre objectifs plombés par la dette, intéressements des managers, manœuvres de captation de contrats et de marchés, tout s’oriente vers une guerre fratricide. Pourtant l’exemple de Cap Gemini et de sa filiale Sogeti aurait dû être édifiant ; après un partage (toujours absurde !) entre projets & assistance technique, Cap avait vu les 2 entités empiéter l’une sur l’autre, au point de devoir arrêter ce jeu de massacre concurrentiel !
La seule ressource garantissant la production et la croissance attendues par les 2 futurs groupes, ce sont les salariés ! Pour que cela fonctionne, il faut une culture d’entreprise que NewAtos et Eviden ne proposent pas sinon en propagande. L’arsenal du management tour, GPTW, Pizza party, After hours et autres raouts vis-à-vis des salariés fourbus, est épuisé. Les salaires sont érodés par une inflation cumulée à 2 chiffres et les Négociations Annuelles Obligatoires 2023 n’ont toujours pas récompensé le travail fourni, ni partagé la valeur produite. Les salariés ont l’impression de trimer pour quelques nantis qui jouent leurs emplois en bourse. Sans parler des « optimisations » fiscales qui les dépossèdent de la participation et de l’intéressement…
Les salariés Atos & Eviden demandent une juste reconnaissance de leur travail. Est-ce que ce message de base peut être entendu par la DRH qui ne nous retourne que mépris ?